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Assurance dommages-ouvrage : rappel du caractère limitatif des sanctions applicables à l’assureur

Affaires - Assurance
28/10/2019
Dans un arrêt du 17 octobre 2019, la Cour de cassation rappelle une jurisprudence bien établie selon laquelle l'article L. 242-1 du Code des assurances fixe limitativement les sanctions applicables aux manquements de l'assureur.
Un acquéreur conclut un contrat de construction de maison individuelle avec une société (depuis en liquidation judiciaire), qui sous-traite les travaux de gros œuvre. Une assurance de responsabilité civile décennale, et dommages-ouvrage a été souscrite auprès d’une compagnie ; une garantie de livraison a également été contractée auprès d’un autre assureur. Se plaignant de désordres intervenus après réception, l’acquéreur, à la suite d’une expertise, assigne le constructeur, le sous-traitant et les assureurs concernés, pour obtenir une indemnisation.

La cour d’appel condamne in solidum l’assureur dommages-ouvrage à payer au requérant une somme au titre des préjudices immatériels et à garantir les assureurs « garantie livraison » et du sous-traitant à hauteur de cette somme.
Se fondant sur l’article L. 242-1 du Code des assurances, les juges du fond retiennent que « les dommages immatériels peuvent être mis à la charge de l'assureur dommages-ouvrage s'ils découlent d'une faute de celui-ci, notamment à défaut d'offre d'indemnisation de nature à mettre fin aux désordres et que, en l'espèce, (l’assureur) ne justifie pas avoir proposé une indemnité destinée au paiement des travaux de réparation des dommages ».

Ce raisonnement est censuré par la Cour de cassation selon le motif que « l'article L. 242-1 du Code des assurances fixe limitativement les sanctions applicables aux manquements de l'assureur dommages-ouvrage à ses obligations ». La cour d'appel ne pouvait donc décider de sanctions autres que celles fixées par la loi.

La position de la troisième chambre civile n’est pas nouvelle quant à l’interprétation limitative, voire exclusive, des sanctions fixées par l’article L. 242-1 précité.
À titre d’exemples, il a été décidé que :
— concernant les dommages :
  • la sanction encourue par l'assureur dommages-ouvrage est limitée à l'objet assuré par les stipulations contractuelles (Cass. 3e civ., 30 juin 2016, n° 14-25.150),
  • la sanction est circonscrite aux dommages immatériels relevant des garanties d’assurances obligatoires (Cass. 3e civ., 12 janv. 2005, n° 03-18.989),
  • l’assureur dommage ouvrage n’a pas à supporter les dommages immatériels résultant de l’exécution tardive de ses obligations (Cass. 1re civ., 17 juill. 2001, n° 98-21.913 : pertes d’exploitation ; Cass. 3e civ., 7 mars 2007, n° 05-20.485 : perte de loyer),
  • l’assureur dommages-ouvrage n’a pas à indemniser le préjudice de jouissance des maîtres d'ouvrage (Cass. 3e civ., 22 mai 2007, n° 06-13.821 ; Cass. 3e civ., 11 févr. 2009, n° 07-21.761) ;
— concernant le non-respect du délai de soixante jours :
  • la sanction est limitée aux désordres affectant la construction faisant l’objet du contrat (Cass. 1re civ., 18 déc. 2002, n° 99-16.551),
  • la sanction ne se conjugue pas avec une cause de responsabilité de droit commun (en l’espèce délictuelle, Cass. 3e civ., 14 sept. 2017, n° 16-21.696) ;
— concernant le montant de la sanction, la sanction fixée par l’article L. 242-1 est d’application stricte et ne peut donner lieu au doublement du taux d’intérêt légal en vue d’indemniser des dommages immatériels (Cass. 3e civ, 19 janv. 2017, n° 15-26.441).

Pour davantage de dévelopements sur les sanctions applicables à l'assureur dommages-ouvrage pour non-respect de ses obligations, voir le Lamy Assurances, édition 2019, n° 3491 et s.
Source : Actualités du droit