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Qui dit reconnaissance de dette dit remise des fonds

Civil - Contrat
30/11/2021
La reconnaissance de la dette fait présumer la remise des fonds. L’emprunteur qui l’a signée et qui prétend ensuite que la somme ne lui pas été remise doit en rapporter la preuve.
Par acte authentique, M. C. reconnaît devoir aux époux M. la somme de 100 000 euros remboursable en une seule fois. Selon les mentions de l'acte, la somme a été versée hors de la comptabilité du notaire. N’ayant pas été remboursés, les époux M. font délivrer à M. C. un commandement aux fins de saisie vente. Pour échapper au remboursement de sa dette, M. C. soutient avoir signé cet acte sous la contrainte et n'avoir jamais reçu cette somme. Il assigne ses créanciers en nullité de la reconnaissance de dette et de l'acte authentique, invoquant le défaut de cause.
 
Les juges du fond reçoivent sa demande, considérant que la reconnaissance de dette, dépourvue de cause, est nulle. L'arrêt retient que « s'il incombe à M. C. de rapporter la preuve que les énonciations contenues dans l'acte notarié ne sont pas exactes, il n'est en revanche pas possible de lui demander de rapporter la preuve d'un fait négatif, à savoir le non versement d'une somme d'argent », et ajoute « qu'aucune des pièces produites n'établit que M. C. a été personnellement destinataire des fonds versés par les époux M. ».
 
Les époux M. se pourvoient en cassation. La reconnaissance de dette présume la remise des fonds. Il incombe à celui qui l’a signée et prétend, pour contester l'existence de la cause de celle-ci, que la somme qu'elle mentionne ne lui a pas été remise, d'en rapporter la preuve.
 
La Cour de cassation leur donne gain de cause. Elle rappelle qu’« en matière de prêt contrat consenti par un particulier, la reconnaissance de la dette fait présumer la remise des fonds, de sorte qu'il incombe à celui qui a signé l'acte de reconnaissance et qui prétend, pour en contester la cause, que la somme qu'il mentionne ne lui pas été remise, d'apporter la preuve de ses allégations ».

Pour dire que la reconnaissance de dette signée est dépourvue de cause et nulle, l'arrêt a retenu que les époux M. ne prouvaient pas que Monsieur C. avait été personnellement destinataire des fonds versés. La cour d'appel a violé les articles 1131 et 1132 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et l'article 1315, devenu 1353 du même code : la charge de la preuve reposait sur l’emprunteur.
La Cour de cassation confirme ici une nouvelle fois sa jurisprudence (Cass. 1re civ., 9 févr. 2012, no 10-27.785, Bull. civ. I, n° 26 ; Cass. 1re civ., 19 févr. 2014, n° 12-35.275).
 
Pour aller plus loin, voir le Lamy Droit du contrat, nos 998 et 2068.
Source : Actualités du droit